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Isularama
10 février 2014

Ce que désormais bien voter veut dire

VOTATION

Tu as bien voté ? C’est la question traditionnelle que l’on pose à ceux qui sortent du bureau de vote, devoir accompli. La réponse est invariable : « Ma di sicuru ! ». Seul le regard en dira plus, complice ou assassin ! Les sous-entendus feront le reste. Mais comme toutes les traditions sont appelées à évoluer, je vais me permettre deux transformations, la première dans l’énoncé et la seconde dans le scénario. Elles devraient suffire à déplacer les sous-entendus.

— L’énoncé ? Sa transformation est simple : il suffit de passer de l’interrogation à l’injonction : « Vote bien ! »

— Le scénario ? Sa transformation est tout aussi simple : elle consiste à enjoindre avant l’entrée dans le bureau plutôt qu’à questionner à la sortie.

— Et les sous-entendus ? Pas de souci, ils restent ce qu’ils sont et chacun les entendra comme ils l’entendent. Mais ils se complètent d’un rappel qui vaut pour tout le monde : bien voter, c’est d’abord voter valide, condition indispensable pour voter utile.

— Voter valide ? Non, ce n’est pas ce que tu imagines. Ce n’est pas la caserne et l’obligation de passer le poste de police en marchant droit, après avoir soufflé un bon coup pour reprendre un minimum d’esprit et de prestance. Là, voter valide, c’est museler sa propension au panachage et au plaisir de transformer les bulletins de vote en grille de tiercé. C’est aussi accepter, si connu que l’on soit, de tenir à la main une pièce d’identité, en application d’un principe d’égalité devant le scrutin qui oblige les bien connus à se faire oublier pour se présenter aux urnes sur le même pied que ceux qu’on ne voit que dans ces circonstances. Ça vaut aussi pour les scrutateurs : ceux qui ne connaissent personne ne sont plus obligés de se tourner vers ceux qui savent pour deviner à leur regard s’ils connaissent.

— En clair ? Scrutin de liste bloquée. Si tu ne vois pas trop ce que ça veut dire, souffle un bon coup et reprend la lecture au premier paragraphe.

— Tu veux la réponse sans repasser par la case départ ? Soit, j’ai un truc plus direct pour ceux qui ne lisent que les avis de décès : le panachage est mort.

— Bien ! Là tu as compris. Alors, fais-moi plaisir. Quand tu viens voter, tu mets ce que tu veux dans tes poches, mais tu laisses le stylo dans la boîte à gant. Et tu prends une pièce d’identité.

— Non ! Malheureux ! Pas la carte vitale…

— Si c’est tout ? C’est l’essentiel. J’ajouterai simplement que tu vas avoir entre les mains un bulletin de vote bifide.

— Bifide ? Fendu en deux. Ne t’inquiète pas ! Bifide, tu vas oublier. Fendu en deux, ça, tu vas t’en rappeler. Une partie, c’est pour la liste des conseillers municipaux, et tu n’es pas dépaysé. L’autre partie, c’est pour la liste des conseillers communautaires.

— Oui, communautaires ! Tu vas aussi élire les conseillers communautaires. Les concom, si tu veux, puisqu’ils siègent à la comcom.

— Comcom ? La communauté de communes. Toi, visiblement, tu ne lis pas les poubelles…

— En résumé ? Le jour des élections, chaque fois que tu croises quelqu’un qui marche d’un pas décidé vers le bureau de vote, sans tenir à la main des sandwichs et des bouteilles d’eau, tu lui dis : « Vote bien ! ». Histoire de lui rappeler que la démocratie panachée c’est terminé. Maintenant, c’est liste sèche pour tout le monde, « lista secca ».


PHOTO : La photo est, bien évidemment, trafiquée. Ce ne sont pas les listes qui sont en train de sécher sur la corde à linge. Au demeurant, l'image est pertinente : les pantalons étendus sont des exemples, à l'inverse des chaussettes, de vêtements bifides. D'après SOURCE

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